“Les parrains de la CPC sont dans le BRDC” – Joachim Kokaté


Qu’il paraît bien loin, le temps où Joachim kokaté arborait le treillis des Forces Armées Centrafricaines (FACA).
Officier d’armée, ministre dans divers gouvernements, il fut aussi un des leaders influent du mouvement anti-balaka. Cette milice d’autodéfense qui combattu sans relâche et jusqu’à la victoire, le pouvoir de la Séléka.
Joachim kokaté est ce qu’on appelle dans le jargon militaire, un “homme de terrain”.
Depuis 2019, il est Ministre Délégué Conseiller Spécial du Président de la République centrafricaine (RCA), Faustin Archange Touadera.
Dans un contexte sécuritaire crispé dans l’arrière-pays, l’homme réputé pour son franc parler nous reçoit dans sa résidence du quartier Ouango à Bangui, pour une interview exclusive.
Monsieur le Ministre, le 5 mai 2023, la rébellion Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) a annoncé dans un communiqué avoir pris la ville de Tiringoulou. Depuis lors, aucune réaction du gouvernement ou de l’état-major. Comment expliquez- vous ce silence ?
Il y a un travail qui se fait sur le terrain. Et dans dans ce cas de figure, l’état major se réserve de communiquer. Le Gouvernement également observe l’evolution de la situation sur terrain, et le moment venu une communication sera faite. Pour le moment, le travail fait sur le terrain mérite discrétion pour que nos FACA soient plus efficaces. Concernant le communiqué de la CPC, c’est du n’importe quoi qu’ils racontent.
Donc selon vous, ce communiqué est un tissu de mensonges ?
Tout à fait, ce communiqué est un tissu de mensonges. La ville de Tiringoulou a été attaquée certes, mais n’est pas tombée entre les mains des rebelles. Ils font une guerre asymétrique. Ils attaquent, pillent, occupent un endroit pour quelques heures, et ensuite ils décampent. Pour l’heure, nos FACAS sont en train de les mettre en déroute.
On recense plusieurs attaques de la CPC ces derniers mois. Quel est votre ressenti par rapport à ces attaques récurrentes ?
La rébellion CPC est composée à 97% de mercenaires étrangers qui se sont associés à un petit groupe de centrafricains pour attaquer notre pays. Je ressens de la honte vis à vis de ces centrafricains là qui s’associent à des étrangers pour endommager leur pays. C’est une honte.
Pouvez-vous nous donner la provenance de ces mercenaires ?
Ce sont des gens venus du Tchad, du soudan et du Niger. Tel que Ali Darassa du Niger, Alkatim du Tchad, et Noureddine Adam qui est un soudanais d’origine. Ce sont des mercenaires que je connais personnellement, et dont les parrains sont des politiques centrafricains.
Et qui sont ces parrains dont vous parlez ?
Les leaders de l’opposition réunis dans le BRDC sont tous des parrains de la CPC. Leur objectif aujourd’hui, c’est une transition pour espérer revenir aux affaires. C’est un petit groupuscule de chefs de partis politiques qui aujourd’hui soutiennent la CPC, comme hier ils soutenaient la Séléka.
Ce sont là des accusations très graves que vous portez. Avez-vous les preuves de ce que vous avancez ?
J’ai les preuves de ce que je dis. Ils veulent s’appuyer sur ces bandits de mercenaires pour s’imposer au Pouvoir. À une certaine époque j’étais leur ami, et aujourd’hui je ne le suis plus. Donc croyez-moi, des preuves, j’en ai. Et je suis prêt à m’occuper de ces gens à tout moment.
Dans une récente interview accordée à un media camerounais, le Président Touadera a déclaré que les rebelles de la CPC sont plus armés que les FACA. Selon vos informations, qui finance ces rebelles qui continuent de sévir dans certaines parties du pays ?
Eux-mêmes les rebelles, disent qu’ils ont des amis et soutiens à l’extérieur de la République centrafricaine, installés dans certains pays en Europe. Leurs parrains disent la même chose. Quand ils disent ça, je me pose la question de savoir, si ces gens sont vraiment centrafricains. Comment peut on se mettre à la solde d’étrangers pour venir détruire son propre pays ?
Quittons le volet sécuritaire et parlons politique. Le BRDC annonce que ses membres ne participeront pas aux prochaines élections locales et municipales. Que pensez-vous de cette prise de position ?
Je considère que les membres de ce bloc que je qualifie d’un rassemblement de minables, ont dû eux-mêmes réaliser qu’ils n’ont plus leur place dans la République. Car s’ils se disent vraiment républicains, alors pourquoi se mettre à l’écart de la masse ?
La CPC dit qu’elle continuera à mener des attaques jusqu’à “l’éviction du Président Touadera, et l’anéantissement de sa milice les requins et de ses mercenaires Wagner”. Que répondez vous à cela ?
À ma connaissance, il n’existe pas de requins dans les eaux en Centrafrique. Je ne sais pas où ils ont vu des requins en RCA, mais moi je n’en ai jamais vu. Maintenant, concernant les rebelles de la CPC ma réponse est claire. Ce sont des cibles militaires qui seront neutralisées et mis hors d’état de nuire.
Vous connaissez bien l’ancien président François Bozizé pour avoir travailler avec lui dans le passé. Vos impressions sur son ralliement à la CPC ?
Là je vous parle avec pincement au cœur. Le président Bozizé a fait sa vie dans l’armée régulière. Il est devenu Général. Ensuite, Chef d’État pendant 10 ans.
Après avoir été chassé du pouvoir par les mercenaires Ali Darassa, Noureddine Adam, Alkatim et autres, aujourd’hui il est devenu leur bon ami. Il a oublié que ces gens ont profané la tombe de sa mère, et ont tué beaucoup de centrafricains.
Vous savez, la population n’a pas encore digérer l’ère Séléka. Donc, je souffres de voir un père qui a perdu son chemin.
Donc pour vous, l’ancien président Bozizé ne saurait pas où il va ?
Exactement. Il est perdu. Et j’appelle les centrafricains qui se sont engagés avec lui dans la CPC à revenir dans la République. Certains se sont rendus compte qu’ils s’étaient trompés. Ils ont choisi le chemin du retour, et nous les avons accueillis fraternellement. Nous avons beaucoup à faire pour reconstruire notre pays ensemble.
Interview réalisée le 7 mai 2023